Point lecture : ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n'en as qu'une
Édition
de mon exemplaire : Édito (Ebook)
Date
de parution : 2015
Résumé :
« Camille,
trente-huit ans et quart, a tout, semble-t-il, pour être heureuse.
Alors pourquoi a-t-elle l'impression que le bonheur lui a glissé
entre les doigts ? Tout ce qu'elle veut, c'est retrouver le chemin de
la joie et de l'épanouissement. Quand Claude, routinologue, lui
propose un accompagnement original pour l'y aider, elle n'hésite pas
longtemps: elle fonce. À travers des expériences étonnantes,
créatives et riches de sens, elle va, pas à pas, transformer sa vie
et repartir à la conquête de ses rêves... »
Mon avis (pas tellement positif) :
J’ai
lu ce livre pour le bookclub de décembre sur livraddict, sinon, je
ne l’aurais jamais ouvert. Le phénomène qu’il a suscité m’a
laissé indifférente, et il ne m’a jamais tenté. J’ai
donc
abordé ce livre avec scepticisme, et malheureusement, mon
scepticisme s’est avéré justifié.
Tout
d’abord, abordons le sujet central de ce roman : le
développement personnel. Si vous souhaitez lire une
vraie histoire, un vrai roman, passez votre chemin. Ce livre
ressemble beaucoup plus à du développement personnel, qui s’essaye
en roman pour être plus digestif, mais c’est tout ! En
revanche si vous voulez commencer à vous intéresser au développement personnel,
ce livre pourrait vous convenir. En effet, si vous êtes comme moi, déjà pas mal rodé en terme de
développement personnel (voir en psychologie, tout simplement), je pense que ce livre ne va pas aborder grand chose de plus que ce que vous savez déjà. Je le recommanderais donc plutôt pour les "débutants", comme une sorte d'introduction au développement personnel. Les notions de bases en développement personnel sont abordées, et c'est une bonne entrée en la matière.
A présent venons-en à notre personnage principal (et là, je vais être un peu plus "cassante"): Camille. Je
n’ai pas du tout réussi à m’identifier à elle. Pour cause, je
l’ai trouvée carrément gnangnan !
Par
ailleurs, ce qui me gêne le plus dans ce roman, c’est la vitesse
avec laquelle le changement s’est opéré chez elle ! Elle est
d’une réceptivité ! Ouah ! C’est surréaliste !
Vraiment, c’est surréaliste. J’ai trouvé que cette histoire
était complètement déconnectée de la réalité. Au final, Claude,
son coach-routinologue, n’arrête pas de lui répéter
que le changement ne sera pas facile, et blablabla, bah en fait…
si. Tout est facile dans ce roman. Peut-être que Camille galère à
certains instants, quand elle se lance à son compte. Mais d’une
manière générale, j’ai trouvé qu’elle avait quand même
beaucoup de chance. En effet, dès qu’un problème survient, elle
appelle Claude, et hop Claude va lui donner une solution.
De plus,
elle réussit du premier coup à monter son business, ce qui, dans la
vie réelle est peu
probable
(pour quelqu’un qui s’est fait refouler
à son
entrée en Master 2, on ne me le
fait pas, j’ai perdu mes illusions de la même façon que j’ai
arrêté de croire au père Noël). Après,
je ne sais pas, peut-être qu’elle galère… Mais si c’est le
cas, on ne le voit pas. Et cela me gêne, parce que ça envoie
un mauvais message sur la réalité de la vie. Bien évidemment, il
ne faut pas être pessimiste non plus, mais croire qu’on peut
réussir aussi vite et aussi facilement que Camille le fait, c’est
un leurre. Vous réussirez oui, peut-être, mais vous allez en chier (pardon pour le vocabulaire, mais je pense qu'il n'y a pas de mot plus adapté). Cependant, on ne vous dit
jamais que vous allez en chier. Alors quand ça arrive, c’est un
peu la panique, et vous risquerez sans doute de vous dire que vous
n’êtes pas normal. Alors que si. J’aurais aimé que ce roman
illustre beaucoup plus les échecs de Camille, son parcours
du combattant pour monter son projet, et qu’elle se prenne des bûches
dans la tronche (parce que c’est ce qui arrive chez les gens
normaux, et pas juste une histoire de refus des banques…). Mais que
malgré toutes ces bûches (oui c'est bientôt Noël faut rester dans le thème), elle n’abandonne pas et elle réussit.
Ça, ça aurait été intéressant, et beaucoup plus réaliste. A la
place non, nous avons : bienvenue à bisounours land ! Ah
oui, et puis, le coup de son collègue désagréable qui devient
subitement gentil… Dans le monde de Camille "tout le monde il est gentil et tout le monde il est content !".
Maintenant,
est-ce que j’en parle ou pas ? Des détections de sexisme
implicite / culture du viol, qu’à fait mon radar de féministe ? (Ohlala, il y
a beaucoup trop de mots qui font peur dans cette phrase).
Oui,
allez, j’en parle. J’en ai principalement noté deux :
Le
premier, c’est au chapitre 13, quand Camille se dispute avec son
mari alors qu’il vient de rentrer du boulot. A ce moment, elle est
en train de jongler entre la cuisine et les devoirs de son fils. Camille travaille à
temps-partiel
certes, mais elle travaille
quand même. Elle rentre du boulot, s’occupe de la cuisine
(d’ailleurs, c’est toujours elle tout au long du roman), et des
devoirs de son fils. Dans
ce contexte, un partage des tâches équitable avec son compagnon,
serait de rigueur, mais ce n’est visiblement pas le cas. Son
mari arrive, il râle parce que la salle de bain est
en bazar, parce qu’il y a des miettes sur le canapé alors… qu’il
ne fout rien ! Une
dispute éclate. Camille en
a marre de tout faire dans la
maison
(normal), et comme la dispute est violente, elle appelle Claude
(Claude
ange-gardien).
A
ce moment là, j’ai trouvé que la réponse de Claude était
nulle. Il va faire comprendre à Camille qu’elle a projeté ses
pensées négatives sur la dispute. J’ai eu le sentiment que Claude
remettait en question la légitimité externe de la plainte de
Camille. En l’occurrence,
son mari se comporte mal, c’est un fait, ce n’est pas une
interprétation effectuée par Camille à cause d'un filtre négatif !
J’ai trouvé que la réponse du routinologue était hors sujet.
Certes, face à ce genre de situation, Camille
a le pouvoir de réagir autrement, ça, c’est ce qu’il lui fait
comprendre et c’est très bien. Cependant, quand Camille
réagit en disant qu’elle a l’impression que dans ce genre de
situation son mari ne l’aime plus, j’ai trouvé que c'était assez
légitime, compte tenu de son comportement. J’aurais aimé que
Claude prenne cette légitimité en considération, avant
de
ramener
immédiatement
Camille à son filtre négatif et à son
apparence physique. Oui, à son apparence physique, il lui dit : « en ce moment vous êtes complexée par vos
kilos en trop, vous vous trouvez moins jolie, et vous projetez sur
votre mari votre peur de ne plus être aimable », j’ai
trouvé ça bof. Sexiste. Sexiste, parce que, la capacité de
Camille à
être aimable est ramenée à son physique, uniquement
à son physique.
Au final, le routinologue sait effectivement que Camille traverse une
période de complexes physiques, mais il ne peut pas vraiment savoir
que sa crainte de perdre son mari est uniquement liée
à son apparence ! Pour le coup, selon moi, c’est lui qui
projette la
cause des craintes
de Camille (son
physique, alors qu’elle ne le dit pas). Il nous offre alors du
sexisme
intériorisé et inconscient. Puisqu’en
effet, dans
notre société, l’importance de l’apparence des femmes prédomine
sur celle des
hommes. Les
injonctions à se « conserver » à « faire des
efforts » pour continuer à plaire à son conjoint, sont alors
plus fortes, pour les femmes qui vieillissent, que pour les hommes, que l’on aurait tendance à trouver plus sexy et virils avec des
cheveux grisonnants !
Lors
de cette scène Camille
valide effectivement les
dires de
Claude,
car oui, Camille aussi a du sexisme intériorisé, comme ce que j’ai
pu relever
dans le second passage qui m’a agacé.
Ce
second passage est plus diffus : on le retrouve à plusieurs moments
dans l’histoire. Il s’agit de la validation des hommes sur son
physique. Camille qui est « tellement plus jolie » quand
elle sourit, Camille, qui sourit aux hommes dans la rue, qui est
contente parce qu’elle se fait draguer, même siffler à un moment
(mais whaaaat ?) Camille qui, du coup, se dit qu’elle
a confiance
en elle grâce à ça et gnagnagni
et gnagnagna.
J’ai eu envie de la prendre, par les épaules, de la secouer et de
lui dire : « meuf, t’as besoin
d’être considérée comme un objet qu’on a envie de sauter pour
avoir confiance
en
toi ? ».
Il est vrai, que certaines femmes peuvent aimer qu'on les regarde. Tant mieux pour vous. Cela dit, mesdames, vous n’avez pas besoin du
regard des hommes pour vous sentir fortes. Vous
êtes fortes. Point. On programme les filles depuis l'enfance à exister pour plaire aux garçons et aux hommes, alors qu'elles sont déjà des humains complets et accomplis même sans ça. Ce qui m’a le plus gêné là-dedans, c’est l’association :
« on me drague, donc j’ai confiance. » Ça
peut avoir l’air de rien comme ça, mais ça véhicule le message
qu’une femme doit être reconnaissante d’être draguée et sifflée.
Et si elle peut être reconnaissante d’être draguée ou sifflée,
elle pourrait aussi être reconnaissante qu’on lui mette une main
aux fesses, ça signifie qu’elle est désirable ; ou qu’on veule la violer, ça signifie aussi qu’elle est désirable… Bref,
vous avez compris, c'est de la culture du viol bien intériorisée.
Pour conclure :
Un
livre qui se lit tout de même vite et bien. Il peut convenir à des personnes qui
aimeraient lire du développement personnel sous forme de roman (et
pas l’inverse!). Les
conseils que donnent Claude sont assez bons.
Cependant,
ce livre regorge aussi de défauts qui m’ont fait froncer le nez. Le personnage de Camille est
assez candide
dans un monde qui visiblement, n’est pas le même que le mien !
Et non, n’en déplaise à Claude, je n’écris
pas
ça à cause d’un potentiel filtre négatif déformant.
Ma
note sur livraddict : 9/20
Lisa
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