Ecrit n°3 : Ceux qui font Noël

Parfois, j’ai quelques souvenirs qui me reviennent. Ils sont lointains, diffus, un peu abstraits.
J’aime le mois de décembre, j’aime Noël. J’ai eu la chance, de grandir dans une famille imparfaite, mais présente. J’ai eu la chance d’avoir des cadeaux, juste ce qu’il fallait pour en mesurer la valeur.

Les souvenirs que j’associe à Noël sont variés. Quand j’étais toute petite, je trimbalais toujours avec moi une radiocassette. D’ailleurs, je l’avais eu à Noël celle-ci. Je me souviens, c’était un Noël organisé par l’endroit où travaille mon père. Il y en avait tous les ans. D’abord un spectacle, puis l’arrivée du père Noël. Ce monsieur barbu que l'on admirait autant qu'il pouvait parfois faire peur. 
Cette radiocassette me suivait partout, et au moment de Noël, j’écoutais une playlist de chansons traditionnelles. « Mon beau sapin » « Vive le vent » « il est né le divin enfant »… j’écoutais des histoires aussi et j’avais plusieurs livres. Des livres avec des jolis dessins, qui mettaient en scène un Noël dans des temps plus anciens. Des vieux villages, des oursons en peluches, des lits avec de la paille, de la neige… Il y avait ces dessins animés aussi, que je réservais pour cette période. Je crois que mon préféré était : « Rudolphe, le renne au nez rouge ». J’ai toujours eu cette affection particulière, pour les personnages rejetés et différents.
Mais ce qui faisait surtout mon Noël, c’était ce calendrier de l’avent en carton que ma mère avait fabriqué, pour s’économiser l’achat des calendriers des supers-marchés. Je ne comprendrais l’arnaque seulement des années plus tard : je n’avais pas de chocolats dans mon calendrier en carton, mais je dois avouer, maman, qu’il était joli. Avec ces petites cases bleues sur lesquelles tu avais noté les jours de décembre, et ce petit père Noël rattaché à une ficelle, que tu avais confectionné toi-même. Il fallait le déplacer de case en case au fur et à mesure que les jours s’envolaient. En soit, ce calendrier de l’avent avait plus de valeur que n’importe quel calendrier des supers-marchés.

Ce qui faisait Noël, c’était ces chants que l’on apprenait à l’école, ces décorations que l’on fabriquaient nous-même, maladroitement parfois, après avoir terminé un exercice de maths. C’était ces cartes que l’on créait pour nos parents, pour notre famille… Je me souviens de mes dessins hésitants, de ce sapin qui ne ressemblait à rien et de ce père Noël bancal. Ce n’était pas la beauté de la carte le plus important. Le plus important, c’était le temps que l’on avait accordé à quelque chose, confectionné pour nos proches.
Parce que moi, je les aie eu chaque année, ces repas de Noël, où toute la famille se retrouve. Ces gens que l’on connaît parfois peu, mais auxquels nous sommes inévitablement liés. Ces gens auxquels on oublie trop souvent de leur dire qu’on les aime.

Les jours ont défilé. Progressivement, la magie s’effrite comme de la peinture trop vieille. J’ai appris que le père Noël n’existait pas en CE1. Mon père avait peut-être culpabilisé de me le dire, alors, il m’avait emmené dans un magasin de jouets et il m’avait acheté une Barbie sirène. Je crois que ça avait étouffé ma déception, mais quelque part, en arrière-fond, on me chuchotait que l’avancée en âge est faite de désillusions.

J’ai arrêté d’utiliser ce radiocassette, et je suis devenue trop grande pour regarder Rudolphe. Mon calendrier de l’avent a été remplacé par des calendriers avec du chocolat. Il n’y a plus eu de spectacles de Noël avec le travail de mon père. Et j’ai arrêté de lire des livres avec des dessins.
Cependant, quelques paillettes demeurent. J’ai continué d’aimer Noël. Nous nous rendions sur les marchés, juste pour le plaisir de regarder. Nous faisions un tour à Jardiland pour aller voir les décorations. Nous nous achetions des cadeaux, les uns pour les autres. Je passais du temps à réfléchir, pour trouver LE cadeau qui ferait vraiment plaisir. Pour tout avouer, je ne sais pas si je suis toujours tombée juste...

Ce qui faisait Noël, c’était l’innocence, l’amour et le partage. Les chocolats, les fruits mer qui parfois rendent malade et les quelques imprévus, comme cette violente cystite que j’ai eue quand j’avais 16 ans, qui m’a conduite tout droit à l’hôpital pour trouver un médecin de garde. Ce sont ces films que l’on regarde le 24 au soir. L’impatience de la nuit, qui devient plus tranquille quand on grandit. Ces réveils aux aurores quand j’avais moins de 10 ans. Ces fois où j’ai attendu pensive devant le sapin, regardant mes cadeaux, pour faire durer l’instant. Le meilleur ce n’est pas quand on ouvre les paquets, le meilleur, c’est le moment qui le précède.

Ce qui fait Noël quand on devient adulte, c’est la nostalgie d’une enfance dont on ne valorise que les souvenirs les plus gais. Ce sont les souvenirs de cette magie, qui demeure encore quelque part, au plus profond de nous-même. Ces souvenirs que l’on ravive, en se passant un vieux dessin-animé, en relisant un vieux conte… tout en sachant que rien ne sera jamais pareil.

Noël nous ramène vers une époque révolue. Noël nous ramène vers l’innocence. Vers l’enfant qui est en nous, que l’on oublie la plupart du temps, mais qui ne disparaît jamais. Noël nous ramène vers lui, et vers ceux que l’on aime, qui nous composent, qui partagent notre sang, certains de nos gênes…

Ceux qui font Noël, ce sont eux. Ce sont les gens qui s’aiment. 
Finalement, ce sont ces gens qui s’aiment qui font que Noël garde encore sa magie et son enchantement, même, bien après, quand les années s’envolent.

Lisa ♥️ 


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